La réalité virtuelle pour mieux apprendre les sciences

Des scénarios pédagogiques favorisant la motivation, l’engagement et le flow

Christine Marquis, Cégep de Saint-Jérôme, Bruno Poellhuber, Université de Montréal et Sébastien Wall-Lacelle, Cégep de Saint-Jérôme

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Rêvez-vous de faire réaliser à vos étudiants et étudiantes un laboratoire sur l’évolution qui s’échelonnerait sur des millions d’années? Aimeriez-vous leur faire utiliser un appareil de HPLC (chromatographie liquide haute performance)? Que diriez-vous qu’ils se plongent dans une cellule afin d’y réaliser la synthèse d’une protéine? Si vous avez répondu par l’affirmative à l’une de ces questions, le projet de recherche que nous déployons dans une université et six cégeps afin de favoriser l’élaboration de scénarios pédagogiques intégrant de la réalité virtuelle dans les cours de sciences a toutes les chances de vous intéresser.

Différentes problématiques liées à l’enseignement et à l’apprentissage des sciences telles que la nature abstraite des concepts scientifiques (Johnstone, 1991), le manque de contextualisation des concepts abordés dans le cours (Osborne et Dillon, 2008) ainsi que la prédominance d’approches d’enseignement orientée vers la transmission plutôt que sur la construction des connaissances (Rosenfield et al., 2005) nous ont amenés à envisager les avantages qu’offre la réalité virtuelle. Ainsi, notre projet de recherche orientée par la conception (design-based research) vise à explorer le potentiel pédagogique et didactique de scénarios pédagogiques intégrant des simulations en réalité virtuelle pour l’apprentissage des sciences au postsecondaire. Il est réalisé par une équipe de 5 chercheurs, 7 conseillers pédagogiques et 39 enseignants de 2 universités et 6 cégeps. Les résultats ont montré que de tels scénarios pouvaient avoir des impacts positifs sur la motivation et l’engagement scolaires ainsi que sur le flow (état de flux), qui se caractérise notamment par une expérience de bienêtre, l’absence de préoccupation à propos de soi, et une intense concentration (Csikszentmihalyi, 1997).

Les perspectives offertes par la réalité virtuelle pour l’enseignement et l’apprentissage des sciences

Plusieurs définitions sont évoquées dans la littérature scientifique au sujet de la réalité virtuelle. Dans leur recension des écrits, Pellas et ses collaborateurs (2020) définissent la réalité virtuelle comme un environnement généré par un système informatique, donnant une impression de réalité, de présence spatiale et d’engagement. Certaines caractéristiques clés décrivent l’expérience qu’offre la réalité virtuelle, soit l’immersion, la présence et l’interactivité.

On peut distinguer trois types de réalité virtuelle : la réalité virtuelle sur ordinateur (RVO), la réalité augmentée (RA) et la réalité virtuelle immersive (RVI). La RVO, qui exploite des applications en 2D sur un écran d’ordinateur, se distingue généralement par son niveau d’immersion plus faible. La RA, qui fait appel à la superposition d’éléments virtuels sur des éléments réels, présente un niveau moyen d’immersion. La RVI, quant à elle, qui nécessite l’utilisation de casques de réalité virtuelle, présente le plus haut niveau d’immersion pour l’utilisateur.

 

 

La réalité virtuelle offre de nombreuses avenues pour l’éducation. Dalgarno et Lee (2010) identifient cinq affordances d’apprentissage des environnements virtuels d’apprentissage 3D (figure 1).

Selon ces auteurs, la réalité virtuelle permet de réaliser des apprentissages expérientiels tels que des expérimentations qu’il est difficile ou impossible de faire dans la réalité. Par exemple, on peut manipuler des objets dans des environnements dangereux de manière sécuritaire ou encore s’initier à des appareils qui seraient trop couteux pour les laboratoires (Lewis et al., 2021). De la même façon, elle permet de s’adapter à différentes échelles de grandeur (comme l’infiniment petit et l’infiniment grand) et d’accéder à des concepts ou phénomènes abstraits imperceptibles à l’aide des sens (Winn, 1993).

De plus, ces environnements peuvent aider les étudiants et étudiantes à se représenter des concepts abstraits, grâce à l’interaction avec des objets dans l’environnement 3D. La représentation spatiale qu’offre la RV par la modélisation 3D ainsi que la possibilité de voir ces objets sous plusieurs angles peuvent certainement aider des apprentissages, en particulier ceux où les habiletés spatiales ont de l’importance, comme la visualisation de molécules.

La réalité virtuelle peut aussi aider les équipes enseignantes à proposer des activités d’apprentissage engageantes qui favorisent la motivation intrinsèque en raison de la possibilité de faire des choix dans l’environnement, des approches souvent basées sur le jeu, du haut degré de concentration ou encore qui suscitent un état de flow (Csikszentmihalyi, 1997).

Par ailleurs, grâce à la contextualisation qu’elle permet, la RV contribue à proposer des activités d’apprentissage signifiantes, favorisant ainsi le transfert des apprentissages. En effet, elle permet de situer les apprentissages dans un contexte authentique en offrant des environnements interactifs et réalistes, ce qui peut contribuer à la réutilisation des connaissances dans d’autres contextes. Par exemple, les étudiants pourraient se plonger physiquement dans un lieu où il y a un problème environnemental et ensuite se déplacer dans un laboratoire pour y réaliser des analyses en vue de trouver une solution.

Enfin, certains environnements virtuels d’apprentissage multijoueurs favorisent des apprentissages collaboratifs en permettant l’interdépendance positive de sorte que chaque membre de l’équipe contribue à l’atteinte de l’objectif final.

Ces possibilités nous ont amenés à nous questionner relativement aux possibilités de l’utilisation de la réalité virtuelle pour l’enseignement et l’apprentissage des sciences en considérant certaines problématiques soulevées plus tôt.

Notre projet de recherche

Notre recherche porte sur les scénarios pédagogiques intégrant la RV plutôt que sur les applications de RV elles-mêmes, car la littérature scientifique démontre que l’encadrement et la scénarisation pédagogiques sont liés à l’engagement et à l’apprentissage (Merchant et al., 2014). Il ne s’agit donc pas seulement d’utiliser l’outil dans son cours, mais plutôt de l’intégrer dans un scénario pédagogique qui permettra aux étudiants d’en retirer le maximum de bénéfices pédagogiques. Pour ce faire, l’équipe a développé le gabarit présenté à la figure 2, fondé sur le modèle de NLN/Jeffries (2012) pour les simulations en soins infirmiers. Ce gabarit permet de détailler chacune des étapes d’un scénario pédagogique complet :

  • Le pré briefing, qui correspond aux activités de préparation et d’activation des connaissances antérieures;
  • Le briefing, où sont données les instructions afin d’assurer le bon déroulement du scénario pédagogique;
  • Le déroulement de la simulation;
  • Le debriefing, qui vise une réflexion guidée à propos de la simulation réalisée à travers l’analyse et la synthèse.

 

Les enseignants et enseignantes élaborent un scénario pédagogique intégrant une simulation de réalité virtuelle avec un conseiller ou une conseillère pédagogique et expérimentent ce scénario en classe. Le gabarit s’est avéré très utile pour amener les équipes à planifier différentes activités à chacune des étapes du déroulement du scénario pédagogique. Il les incite à alterner entre le travail individuel, le travail d’équipe et le travail en grand groupe, à réfléchir aux activités réalisées hors classe ou en classe, et à intégrer l’apprentissage actif et l’apprentissage collaboratif.

La figure 3 illustre l’apparence des simulations virtuelles Labster utilisées pour le volet RVO du projet (https://www.labster.com/simulations/hplc/). Ces simulations se présentent sous forme de jeux de rôles ou de missions dans lesquelles certains problèmes doivent être résolus en répondant à des questions ou en réalisant certaines analyses avec les instruments de laboratoire spécialisés associés au domaine du problème. Dans l’exemple illustré plus bas, l’étudiant doit choisir les phases stationnaires et mobiles de son HPLC avant de procéder à la séparation des composants d’un médicament.

 

 

Notre recherche, qui suit une méthodologie de type recherche orientée par la conception, implique une collecte de données quantitatives (questionnaires) et qualitatives (entrevues) auprès de plus de 45 enseignants et enseignantes et 6 500 étudiants et étudiantes.

Les principaux constats issus des premières itérations du projet

L’importance du scénario pédagogique

Les résultats des deux premières itérations portant sur le volet RVO avec les simulations Labster laissent présumer de l’importance de la qualité des scénarios élaborés par le personnel enseignant. En effet, nos résultats quantitatifs préliminaires nous laissent croire qu’en général, les scénarios pédagogiques plus élaborés obtiennent des résultats plus élevés pour les différentes échelles liées à l’intérêt, à la motivation et à l’engagement scolaires. Des analyses quantitatives sophistiquées (analyses multiniveaux) confirment l’importance de la qualité du scénario pédagogique pour l’engagement affectif des étudiants et étudiantes.

Dans ce contexte d’intégration de simulations en RVO dans des scénarios pédagogiques élaborés par les enseignants, certains éléments de ces scénarios sont davantage appréciés par les étudiants, éléments que nous pouvons regrouper sous quatre thèmes :

  • Préparation préalable (pré briefing)
  • Familiarisation et consignes présentées adéquatement (briefing)
  • Encadrement durant la simulation (déroulement)
  • Retour sur la simulation (debriefing)

Par ailleurs, les étudiants soulignent l’absence de ces éléments comme étant des points faibles des scénarios pédagogiques.

De leur côté, les enseignants soulignent que le choix des activités incluses dans le scénario ainsi qu’une préparation adéquate des étudiants à la simulation s’avèrent des forces de leurs scénarios. Par contre, le retour sur la simulation était souvent un point du scénario à améliorer.

En lien avec le modèle théorique mobilisé pour la scénarisation pédagogique, ces constats nous amènent à évoquer une première implication pour l’enseignement.

Implication 1 :

Une utilisation optimale de la réalité virtuelle pour l’enseignement des sciences implique l’élaboration de scénarios pédagogiques soigneusement planifiés pour chacune des étapes du scénario. Dans son scénario, un enseignant devrait rendre les étudiants actifs, entre autres, en leur proposant de faire une préparation adéquate, qui peut nécessiter par exemple un retour sur les connaissances antérieures (pré briefing) et des consignes permettant de les orienter avant la simulation (briefing), en offrant un encadrement durant la simulation et en prévoyant un retour sur la simulation, ainsi que des contextes de réutilisation des connaissances (débriefing).

Les avantages perçus de la RVO

À la suite de leur expérience avec la RVO, les enseignants et les étudiants ont relevé un grand nombre d’avantages pédagogiques des simulations proposées. Les avantages présentés au tableau 1 nous amènent à formuler une deuxième implication pour la pratique.

Tableau 1 : Avantages de la RVO perçus par les enseignants et les étudiants

 

Avantages perçus

Description

Diversification des méthodes pédagogiques

Offre une avenue différente pour enseigner et pour apprendre.

Visualisation

Permet de se représenter des concepts abstraits, invisibles.

Consolidation des apprentissages

Permet de mieux comprendre des contenus qui ont déjà été enseignés, notamment par la répétition.

Introduction des contenus théoriques

Sert à présenter les concepts qui seront enseignés plus explicitement par la suite.

Contextualisation des apprentissages

Permet d’amener un contexte aux apprentissages scientifiques.

Préparation de laboratoire améliorée

Permet de bien se préparer avant les labos, de bien comprendre les étapes, la fonction des instruments, ce qui réduit le stress.

Aspect ludique des simulations

Propose un avantage pédagogique en raison de son aspect amusant et plaisant.

 

Implication 2 :

Un enseignant en sciences peut utiliser des scénarios intégrant la RVO (par exemple avec les simulations Labster) dans le but de diversifier ses méthodes d’enseignement, de contextualiser les apprentissages et de permettre la visualisation de concepts abstraits, des éléments ciblés comme problématiques dans l’enseignement des sciences.

Les effets sur la motivation, l’intérêt, l’engagement et le flow

L’analyse quantitative des questionnaires remplis par les étudiants montre des effets notables sur plusieurs fronts. L’ensemble des échelles mesurant l’intérêt, la motivation, l’engagement, le flow, l’acceptation et la perception de valeur ont affiché des scores très hauts. De ces résultats, cinq principaux constats émergent :

  • Les étudiants et étudiantes ont une perception très positive de l’utilisation de ces simulations, avec une moyenne très élevée à la question « Dans quelle mesure votre expérience à la RV a-t-elle été négative (1) ou positive (7)? ».
  • Les étudiants et étudiantes voient deux composantes principales à la valeur de ces simulations, soit une composante utilitaire et une composante affective. Bien que ces deux perceptions affichent des résultats très hauts, la perception affective affiche un résultat légèrement plus haut.
  • Les échelles de plaisir, de perception d’apprentissage, d’intérêt, de flow et d’engagement affectif affichent toutes des résultats particulièrement élevés.
  • L’utilisation des simulations dans certains cours généralement associés à un intérêt moins élevé chez les étudiants et étudiantes a mené à une hausse significative de leur intérêt.

Ainsi, en plus de montrer que les simulations en RVO sont généralement grandement appréciées des étudiants, nos résultats conduisent à penser que ces simulations ont le rare potentiel de les engager sur les plans tant cognitif qu’affectif.  Ainsi, elles s’avèrent être un outil prometteur afin de remédier aux problématiques évoquées en introduction.

Implication 3 :

Un enseignant en sciences a intérêt à utiliser des scénarios pédagogiques misant sur la RVO pour procurer une expérience immersive qui favorise l’intérêt et l’engagement affectif, ainsi que la perception de valeur de la tâche. Peu de méthodes ou d’outils le permettent.

Vers la réalité virtuelle immersive en classe

Différents enjeux pouvant affecter la motivation scolaire ainsi que l’apprentissage des sciences tels que le niveau d’abstraction des concepts (qui sont souvent imperceptibles à l’aide des sens), le manque de contextualisation de ces concepts et des approches d’enseignement souvent fortement magistrocentrées nous ont amenés à envisager que la réalité virtuelle (sur ordinateur et immersive à l’aide de casques de réalité virtuelle) pourrait apporter de nombreux avantages relativement à ces enjeux.

Notre recherche permet jusqu’à maintenant d’amorcer la mise en évidence du potentiel pédagogique de la RVO pour l’enseignement et l’apprentissage des sciences. En effet, les simulations utilisées dans le cadre du volet RVO présentent des avantages perçus à la fois par les étudiants et les enseignants, simulations qui sont très arrimés aux problématiques décrites plus tôt soit la visualisation, la contextualisation des apprentissages ainsi que la diversification des méthodes pédagogiques. Bien que les simulations utilisées puissent apparaitre comme étant complètes sur le plan pédagogique (mise en situation, questions, manipulations), elles doivent être intégrées dans des scénarios pédagogiques relativement élaborés afin que les bénéfices pour l’apprentissage soient maximisés. Enfin, les scénarios pédagogiques intégrant les simulations amènent aussi des avantages en ce qui a trait, notamment, à la perception de plaisir, à la perception d’apprentissage, à l’intérêt, au flow et à l’engagement affectif.

Nous nous affairons présentement à explorer le potentiel de la RVI (avec casque RV). Nous avons, pour ce volet, établi une liste de critères de qualité pour une application éducative en RVI (à paraitre). De plus, une première expérimentation exploratoire nous laisse croire que certaines des caractéristiques propres à la RVI pourraient être avantageuses pour l’apprentissage. Nous souhaitons, à la session d’automne 2022, déployer un dispositif méthodologique semblable à celui décrit plus haut dans des groupes où les enseignants feront vivre à leur groupe une application RVI dans un casque, application qui sera encadrée par un scénario pédagogique.

 

Références

Csikszentmihalyi, M. (1997). Flow and education. NAMTA journal, 22(2), 2‑35.

Dalgarno, B. et Lee, M. J. W. (2010). What are the learning affordances of 3-D virtual environments? British Journal of Educational Technology, 41(1), 10‑32. https://doi.org/10.1111/j.1467-8535.2009.01038.x

Jeffries, P. R. (2012). Simulation in nursing education: From conceptualization to evaluation. National League for Nursing. https://books.google.ca/books?id=f87EMQEACAAJ

Johnstone, A. H. (1991). Why is science difficult to learn? Things are seldom what they seem. Journal of Computer Assisted Learning, 7, 75‑83.

Lewis, F., Plante, P. et Lemire, D. (2021). Pertinence, efficacité et principes pédagogiques de la réalité virtuelle et augmentée en contexte scolaire : une revue de littérature. Médiations et médiatisations, 5, 11‑27.

Merchant, Z., Goetz, E. T., Cifuentes, L., Keeney-Kennicutt, W. et Davis, T. J. (2014). Effectiveness of virtual reality-based instruction on students’ learning outcomes in K-12 and higher education: A meta-analysis. Computers & Education, 70, 29‑40. https://doi.org/10.1016/j.compedu.2013.07.033

Osborne, J. et Dillon, J. (2008). Science education in Europe: Critical reflections (Vol. 13). The Nuffield Foundation.

Pellas, N., Dengel, A. et Christopoulos, A. (2020). A scoping review of immersive virtual reality in STEM education. IEEE Transactions on Learning Technologies, 1‑14. https://doi.org/10.1109/TLT.2020.3019405

Rosenfield, S., Dedic, H., Dickie, L., Rosenfield, E., Aulls, M., Koestner, R., Krishtalka, A., Milkman, K. et Abrami, P. (2005). Étude des facteurs aptes à influencer la réussite et la rétention dans les programmes de la science aux cégeps anglophones. Vanier College.

Winn, W. (1993). A conceptual basis for educational applications of virtual reality. (Technical Publication R-93-9; Human Interface Technology Laboratory of the Washington Technology Center). University of Washington. http://www.hitl.washington.edu/research/education/winn/winn-paper.html~